La danse butô

La danse butoh est une danse contemporaine née au Japon à la fin des années cinquante sous l’impulsion de Tatsumi Hijikata.
Dans l’élan de rébellion et de libre création qui caractérise la scène culturelle d’après-guerre, le butoh s’est imposé, en marge des valeurs établies, comme un courant innovant et indomptable qui a largement influencé les mouvements d’avant-garde du Japon et d’Occident.
Le butoh est insaisissable en tant qu’il n’est pas un style de danse ni une philosophie, mais plutôt une sorte de comportement ineffable produit par le corps même, qui, vidé de « sa personne », peut vivre le caché, le profond, la mémoire ancestrale.
Cette « danse du corps obscur » exposée à une incessante transformation relie la mort à la vie.
Elle est une invitation au spectateur à vivre dans sa propre chair le monde intérieur du danseur.

Le butô et moi

Un jour, en classe de seconde, notre professeur de musique nous a fait écouter le début du « Sacre du printemps » d’Igor Stravinsky. Sagement assis sur ma chaise, au moment où surgissent les premiers rythmes guerriers, j’ai senti chaque fibre de mon corps danser dans une immobilité sidérée. Corps dilaté, esprit souverain, je suis entré dans une danse totale.

Quelques temps plus tard, j’ai vu à la télévision Pina Bausch interpréter la danse de l’élue sur ce même Sacre du printemps. Nouveau choc, nouvelle révélation qui venaient déterrer mon désir secret de danser.
Les années ont passé. Je suis entré à l’Ecole des Arts Décoratifs de Strasbourg. A défaut d’oser suivre un cours de danse, je suis allé voir tous les spectacles de danse contemporaine au Maillon. Je me souviens du touchant solo de Suzanne Linke.

En 1987, une certaine Karlotta Ikeda et sa compagnie Ariadone étaient programmées : de la danse butoh venue du Japon. La fascination était immédiate. Quelques jours plus tard, j’ai participé avec un bonheur sans modération à mon premier stage de danse avec Karlotta et les sept femmes de sa compagnie. Leur venue était clôturée par la projection de films de spectacles du fondateur de la danse butoh Tatsumi Hijikata, notamment des extraits de Hosotan et Paysages de vent.
Puis en 1990 avait lieu à Paris un festival de danse butoh. J’ai pu admirer Kazuo Ohno et son fils Yoshito en spectacle et suivre un stage mémorable avec Yoshito. J’ai vu d’autres danseurs. De chacun il me reste des souvenirs vivaces.
Et j’ai vu « Demi-démon » de Masaki Iwana.

Si le butoh était une danse subversive, le butoh de Masaki Iwana était subversif à l’intérieur du butoh. Si le butoh avait ouvert de nouvelles frontières dans le monde de l’art, celui de Masaki Iwana ouvrait des horizons nouveaux à l’intérieur du butoh.

De janvier à juin 1991, Masaki Iwana proposait un week-end de stage par mois à Paris, une semaine en juin pour préparer le spectacle « La princesse aux fleurs de cerisiers ». J’ai continué de suivre ses stages en France, en Suisse, en Italie jusqu’au premier stage d’un mois « Spanning the centuries » l’été 1996 à La Perrotière dans le Perche. Je l’ai aussi invité plusieurs fois à danser à Strasbourg. Egalement Mitsutaka Ishii et, à Seebach pour une collaboration, Maki Watanabe et Gyohei Zaitsu.

En parallèle, depuis 1993, je créais un solo chaque année. En 1998, à l’issue d’une première collaboration avec des musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, j’ai créé la Compagnie Poussière de rose.
A partir de cette date, et pendant dix ans, j’ai laissé reposer le butoh des autres pour mûrir le mien.

La compagnie Poussière de rose

Le noyau de la compagnie Poussière de rose est formé par le peintre et danseur Dominique Starck, le compositeur de musique instrumentale, chorale, électronique René Bastian, la créatrice textile Camille Schléret et le régisseur lumières Xavier Martayan.
Selon les projets, elle fait appel à d’autres danseurs, plasticiens et musiciens.
Créée en 1998, la compagnie Poussière de rose se consacre à faire connaître la danse butoh tout comme le travail pictural de Dominique Starck et d’autres artistes.